Don Giovanni ouvre la porte : la statue du Commandeur se tient face à lui, l'homme "qui n'a pas de coeur ou dont le coeur est en pierre" chantait Leporello dans la scène précédente.
La plupart des éléments musicaux des mesures 433 à 481 se retrouvent dans la 1ère partie de l'Ouverture, (composée après l'opéra).

On distinguera ici chez les 3 personnages en scène les différences d'élocution : le Commandeur - continuellement en valeurs longues, asseyant ainsi le charisme qui convient à un personnage à la fois massif et surnaturel ; Don Giovanni - reprenant de sa superbe après l'étonnement du début, et ses interventions -tout en étant brèves sont accentuées ; Leporello, quant à lui tremble de tout son être et les répliques qu'il adresse au public commentent son état à grand renfort de répétitions qui nourrissent la bouffonnerie de son personnage.

Les 4 premières mesures sont identiques à celles du début de l'Ouverture, à la différence ici qu'elles ouvrent brutalement la scène sur un accord de septième diminuée (explication) en rythmes syncopés avec la tenue de la dernière basse de l'accord suivi de l'accord de la dominante de :

C'est le Commandeur qui apporte la résolution de l'accord de dominante dans les premières notes de son entrée :

Si d'emblée nous connaissons déjà la fin inéluctable de la mort de Don Giovanni, celle-ci semble retardée par des bavardages où les interlocuteurs se coupent volontiers la parole. Malgré l'impératif énoncé mes. 474 par le Commandeur, les discussions reprennent (Notez dans la phrase et son accompagnement la présence du rythme funèbre de noire-pointée-croche) :

Observez l'assise implacable du libertin, qui par 2 fois et en dépit de cette présence surprenante et terrifiante, fait montre de maîtriser la situation. Citons la 2e réplique (mes. 482 à 485) Parla, parla, ascoltando ti sto. "Parle, parle, je t'écoute.", sur une cadence parfaite en la mineur :


Ce n'est qu'à partir de la mes. 487 que le Commandeur parvient enfin à exprimer les raisons de sa présence : verrai tu a cenar meco ? "viendras-tu dîner avec moi ?". La formulation a de quoi étonner : Dans la scène "du cimetière", le libertin invitait la statue du Commandeur à dîner, ce que fait ici ce dernier. L'homme de pierre ne pouvant accéder aux nourritures terrestres, il demande alors à son tour à Don Giovanni de venir dîner avec lui.

Toute la phrase du Commandeur (chromatique) est sujette à un traitement harmonique particulièrement élaboré : sur un rythme funèbre de noire-pointée-croche cité plus haut, un accompagnement sur une basse chromatique ascendante progresse en une succession d'accords où chaque nouvelle intervention fait entendre violemment une septième diminuée (jouée forte puis piano), elle-même amenée par un glissement des voix :





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Scène 15 (SUITE)